Depuis la moitié du XIVe siècle, la France se pare de lumignons pour le 8 décembre. Tradition séculaire qui ouvre les festivités de fin d’année, on attribue souvent l’origine des illuminations à la Capitale des Gaules et à une promesse faite à Marie, qui aurait protégé Lyon de la peste. A tort…
Illuminations du 8 décembre, que de légendes…
La version la plus courante pour expliquer l’origine des illuminations est le Voeu que les échevins (les notables) lyonnais auraient formulé à la Vierge Marie, en 1643, pour protéger la Capitale des Gaules de la peste, qui ravageait alors le sud de la France. Si la peste ne touchait pas Lyon, les notables auraient alors promis de rendre hommage, chaque année à la même date, à la Vierge. Le miracle s’est réalisé, Lyon a été épargnée, et chaque année qui a suivi a vu la municipalité organiser un cortège traversant la ville… mais le 8 septembre !
Une autre version voudrait que ces mêmes notables, effrayés par l’invasion annoncée des Prussiens en 1870, auraient formulé la même promesse à la Vierge : si Lyon restait sauve, ils l’honoreraient tous les ans, le 8 décembre. Même si Lyon fut bien épargnée, ce n’est pas ce nouveau voeu qui donna naissance à la tradition, puisque celle-ci s’est ancrée dans l’Histoire 18 ans avant… Toutefois, l’histoire de l’invasion prussienne a ceci de vrai que, pour remercier Marie d’avoir sauvé Lyon, l’archevêché lancera 2 ans plus tard la construction de la Basilique de Fourvière. En remplacement de la petite chapelle qui, elle, est à l’origine même de la tradition…
Marie, l’Église et les Lyonnais au casting de la tradition
En réalité, les origines de la tradition des illuminations du 8 décembre comptent bien Lyon (mais pas seulement), Marie et l’Église au casting… et même indirectement le Voeu des Échevins.
En 1850, la pieuse municipalité de Lyon lance un concours pour offrir à la petite chapelle Saint-Thomas de Fourvière, en piteux état, une rénovation dont le point d’orgue sera une statut de Marie. Après la rénovation de la chapelle, on a prévu d’inaugurer la statue le 8 septembre 1852, jour de la Nativité de la Vierge Marie et date anniversaire du Voeu des Échevins.
Une fête grandiose est prévue : des feux de Bengale doivent illuminer la statue qui sera dévoilée, des fanfares joueront dans les rues, des feux d’artifices seront tirés depuis la colline et… les Lyonnais devront illuminer les fenêtres de leurs maisons !
Mais une crue historique de la Saône perturbe les préparations et les festivités se doivent d’être repoussées. Les autorités religieuses et laïques choisissent donc une nouvelle date, celle de la Fête de l’Immaculée Conception… et du 8 décembre 1852 !
Si la France entière s’illuminera dès le 5 décembre, ce ne sera pas pour Marie mais pour Napoléon qui vient de proclamer le Second Empire. Mais la frange ouvrière de Lyon ne veut pas honorer celui qui a perverti sa Révolution, et décide de garder ses ornements et ses lumignons pour le 8 décembre.
Le 8 décembre, des festivités plus populaires que religieuses
Le jour venu, de violents orages frappent la Capitale des Gaules, et le spectre de l’annulation ressurgit. L’Église décide de reporter les festivités… mais pas les Lyonnais qui jouent la fronde jusqu’au bout ! Le Lyonnais a une patience limitée et une sacrée tête de mule ! Le 8 décembre, il fera ce qu’il a prévu depuis 3 mois : il fera la fête !
Le soir même, alors que cessent les pluies et que s’éloignent les nuages, les lumignons apparaissent aux fenêtres, la foule envahit les rues, au rythme des fanfares.
Le 8 décembre est né et, contrairement à ce que l’on croit, c’est bel et bien le peuple qui a décidé et non pas l’Église, qui a dû se raccrocher à la volonté populaire pour honorer la Vierge.
Une tradition devenue une carte de visite internationale pour Lyon
Si la tradition est rapidement devenue nationale, on ne peut pas nier qu’elle a un ancrage aujourd’hui très lyonnais.
Depuis une vingtaine d’année, la coutume populaire locale a peu à peu cédé la place à un spectacle « son et lumière » à la portée internationale développée par les édiles successifs de la Ville, en particulier Michel Noir et surtout Gérard Collomb.
La foule en liesse, entassée dans les petites rues de la Presqu’île ou du Vieux Lyon, mitraillée de farine ou d’oeufs par les facétieux Lyonnais depuis leurs fenêtres illuminées, s’est au mieux fondue aux hordes de touristes qui, à défaut de Prussiens, envahissent maintenant pendant 4 jours les rues de Lyon pour assister aux fameuses « Fêtes des Lumières ».
Et si l’on honorait les personnels de santé pour ce 8 décembre 2020 ?
Quand on sait comment est née la tradition, peut-être pourrait-t-on la joindre à l’utile, en pensant à celui ou celle, quelle que soit notre religion, qui pourrait peut-être nous donner un petit coup de main pour mettre un grand coup de pied à ce fichu virus ?
Faute de « Fêtes des Lumières » cette année (annulée en raison des conditions sanitaires), et si l’on avait tout simplement une pensée pour celles et ceux qui sont en première ligne contre le virus, lorsque nous mettrons nos lumignons sur les rebords de nos fenêtres ?
Ne sont-ils pas nos Saints les plus sûrs depuis le début de cette triste année 2020 ?
1 commentaire
Un grand bravo pour ce message que très peu de monde connaissait !! Très intéressant et enrichissant. Il donne aussi du courage à tous ceux qui souffrent en ce moment. Bon 8 Décembre !!
Lulue et JM