Tencent, géant chinois de la communication, lancera cette année la construction de sa ville du futur : Net City. Majoritairement piétonne et dédiée aux transports en commun, aux espaces verts et aux énergies renouvelables, elle pourrait bien révolutionner l’urbanisme et offrir de nouvelles pistes pour l’avenir.
Une ville campus pour Tencent
S’il y a des thèmes pour lesquels la Chine n’apparaîtra sans doute jamais sur notre fil, l’environnement et les innovations de l’Empire du Milieu en la matière risque d’en faire un abonné assidu.
Alors que nous évoquions récemment la résolution historique de la Chine et de son président Xi Jinping d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2060, voici que l’un de ses fleurons technologiques, Tencent (propriétaire de WeChat et Tencent QQ), lance cette année un chantier monumental pour créer une ville-campus de la taille de Monaco : Net City.
Située en bord de mer, dans la métropole en pleine expansion de Shenzen (sud de la Chine), Net City serait « une ville dans la ville » de 2 millions de mètres carrés. Presque entièrement fermée aux voitures, dédiée aux piétons, aux espaces verts et aux modes doux, elle révolutionnerait l’urbanisme mondial.
Prévue pour recevoir environ 80 000 personnes (l’équivalent de Pau ou de Rueil-Malmaison), Net City a été pensée par Tencent pour recevoir ses bureaux et les résidences de son personnel, dont le nombre est estimé à plus de 60 000.
Toutefois, elle ne se limitera pas à être une ville campus et devrait aussi accueillir des magasins, des écoles et tous les équipements publics nécessaires.
L’objectif est également de la garder connectée au reste de la ville Shenzen par le biais de ponts routiers (principalement pour les transports en commun), de ferries et du métro de la ville.
Une ville ouverte sur la ville
« Ville dans la ville », certes, mais également centre d’intérêt au coeur de Shenzen. En effet, les concepteurs du projet espèrent aussi que ce nouveau « quartier » saura attirer les visiteurs extérieurs. Pour cela, des lieux de divertissements, des parcs et l’aménagement des berges feront office d’aimants à touristes.
De cette manière, Net City diffère des autres projets de villes mastodontes autocentrées telles que Toyota ou encore Sidewalk Labs (filiale de Google) envisageaient d’en construire. Tencent veut construire une ville qui deviendra un poumon de Shenzen, tout en répondant à de nouvelles règles d’urbanisme révolutionnaires en termes environnementaux et sociétaux.
Jonathan Ward, membre de la firme américaine NBBJ – qui a remporté un concours international pour la conception du site -, confirmait en juin dernier à CNN que « ce devait définitivement être une destination à composante civique ». Assurant que « ce n’est pas censé être une île isolée et sécurisée, c’est une ville dynamique. Les gens la traverseront, ils se connecteront, et ce sera une plaque tournante vitale pour Shenzen ! ».
La voiture limitée au strict nécessaire
Bien que les concepteurs confessent la difficulté de bannir totalement la voiture, son usage a toutefois été complètement repensé pour le limiter à sa plus faible expression.
Le plan de la ville s’articule ainsi autour d’un couloir vert dévolu aux bus, aux vélos et aux véhicules autonomes, éliminant de fait tout trafic inutile.
Comme l’explique encore Jonathan Ward, « vous n’avez pas besoin de pâtés de maison entourés de routes. Vous pouvez peut-être avoir 8 pâtés de maison entourés d’une route, et permettre à tous ceux qui se trouvent entre les deux de circuler quand même ! Nous avons « soustrait » des routes dans des endroits où nous pensons qu’il est tout à fait acceptable pour les gens de marcher 2 minutes depuis un métro ou un arrêt de bus ».
Une ville recentrée sur l’homme et sur les interconnexions
Et pourquoi ne pas mettre à profit ces deux minutes pour se connecter à la nature ou rencontrer des collègues ou des voisins ? Car c’est ainsi que le projet de NBBJ a été conçu pour Tencent : comme un « écosystème organique interconnecté et axé sur l’homme ».
Pour le géant chinois, il s’agit ainsi de grignoter doucement la barrière entre la vie professionnelle et la vie privée, concept renforcé encore par les effets de la pandémie.
Toujours selon Ward, « les villes traditionnelles sont très cloisonnées, même dans les villes les plus denses où il y a le plus d’interaction et de mélange. […] Mais ce qui peut arriver maintenant, c’est que vous pouvez commencer à brouiller ces frontières entre le travail et les loisirs, et apporter plus d’interaction entre les différentes parties de votre vie ».
Mouais… Mélanger vie privée et vie professionnelle, est-ce vraiment à souhaiter ?
« Oui » selon Tencent, si l’on souhaite mieux harmoniser les deux et, de fait, améliorer sa vie.
Une ville plus verte, nourrie par les énergies renouvelables
Chez le plus gros pollueur de la planète, envisager de construire une ville « verte » semble relever de la gageure, mais cela rejoint aussi la prise de conscience nationale que pour mieux vivre demain, des efforts urgents sont inévitables.
Et sur ce point encore, Net City voudrait se montrer exemplaire.
Outre la multiplication des espaces verts, des modes doux de déplacement et la limitation maximale de trafic routier, Net City fera appel aux énergies renouvelables et au recyclage.
Végétalisation des façades et des toits, installation de panneaux solaires, retraitement autonome des eaux usées, construction stratégique de certains immeubles pour créer le maximum d’ombre possible (et limiter le recours à la climatisation)… Autant d’applications qui devraient rendre la ville la plus écologique possible et agréable à vivre.
Tous les regards et les espoirs sont donc tournés vers Net City qui, à l’issue de ses 7 ans de chantier, aura peut-être inspiré d’autres projets qui viendront révolutionner l’urbanisme mondial en ayant un impact direct et plus harmonieux sur l’environnement.